Pandore
Héroïne grecque
Au commencement, les hommes vivaient sans la présence des femmes. Ils cultivaient la terre comme on cultive des céréales. Ils n'éprouvaient aucune forme de souffrance, ni la fatigue qui accompagne les longues journées de travail, ni la vieillesse faisant vieillir les corps, ni même la douleur physique ou morale. Ces hommes vivaient jeunes, et lorsqu'ils mouraient, c'était dans un calme absolu, semblable à celui du sommeil éternel. Ils disparaissaient sans bruit, comme des plantes sans histoire, leur passage sur Terre n'ayant laissé aucune trace significative. Leur existence, bien que pure, manquait pourtant d'émotions et de complexité.
Alors, depuis son trône au sommet de l'Olympe, Zeus, le roi des dieux, décide de leur offrir un cadeau. Il ordonne à Héphaïstos, le dieu du feu et des forges, de façonner une créature à partir de la terre et de l'eau, une figure ayant la beauté divine des déesses immortelles. Cette créature, cependant, serait plus qu'une simple déesse. Tous les autres grands dieux de l'Olympe contribuent à sa création. Athéna, la déesse de la sagesse et des arts, lui enseigne l'habileté manuelle. Aphrodite, la déesse de l'amour et de la beauté, lui accorde la grâce et le charme. Hermès, le messager des dieux, y ajoute une touche particulière : il insuffle dans cette nouvelle créature le mensonge et la fourberie, peut-être par moquerie. Ainsi, Pandore est née, une beauté divine à l'apparence parfaite, mais au fond de son coeur, elle demeure humaine et imparfaite.
Zeus, dans un acte symbolique de don divin, offre cette créature à Epiméthée, le frère de Prométhée. Epiméthée est l'opposé de son frère : alors que Prométhée est prévoyant et sage, Epiméthée est impulsif, sans réflexion et toujours à la traîne. Prométhée l'avait pourtant averti avec insistance : il ne devait jamais accepter un cadeau de la part de Zeus, car celui-ci était sûrement destiné à leur nuire d'une manière ou d'une autre. Mais l'apparence magnifique de Pandore et la tentation qu'elle représente sont irrésistibles pour Epiméthée. Elle arrive devant lui, ornée de colliers brillants, de perles scintillantes, de fleurs exquises, et vêtue des habits les plus somptueux. Face à elle, Epiméthée cède et accepte ce cadeau comme un présent du ciel, ignorant les avertissements de son frère.
Cependant, Pandore, bien qu'elle semble être un don merveilleux, cache en elle un piège mortel. Elle représente désormais un changement pour l'humanité : l'homme, auparavant libre et sans contraintes, doit désormais partager sa vie avec elle. Il doit jongler avec ses désirs, ses besoins et ses caprices. Il doit la charmer, la satisfaire, la faire vivre et honorer ses attentes pour avoir des enfants. Au fil du temps, l'homme se rend compte qu'il devient possessif, jaloux, et parfois même cruel envers elle. Ce qui semblait être une bénédiction se transforme en un fardeau. Ce qui aurait dû être un monde harmonieux, fondé sur la solidarité et la paix, devient un lieu de souffrance, de disputes et de rivalité. L'homme, désormais enchaîné à Pandore, se trouve tiraillé entre ses désirs personnels et l'influence de cette nouvelle présence dans sa vie.
La boîte de Pandore
Lorsque Pandore arrive chez Epiméthée, elle porte avec elle une jarre mystérieuse, un objet qu'il est strictement interdit d'ouvrir. Il s'agit de la fameuse "boîte de Pandore", symbolisant à la fois la curiosité et les dangers en découlant. Mais, comme toute personne animée par une curiosité insatiable, Pandore, après s'être installée et s'être accoutumée à sa nouvelle vie, ne peut résister à l'envie de soulever le couvercle de la jarre. Une fois qu'elle l'ouvre, tous les malheurs, les souffrances et les malédictions étant contenus à l'intérieur se libèrent instantanément et se répandent dans le monde entier. La souffrance, les maladies, la vieillesse, la mort, les mensonges, le vol et même les crimes se mélangent à tout ce qui était jusque-là positif dans la nature, les villes et les foyers humains. Ces malheurs se propagent partout, infectant l'humanité tout entière.
Pandore, horrifiée par ce qu'elle a déclenché, referme précipitamment le couvercle de la jarre. Lorsque la poussière se dissipe, elle constate que la jarre est presque vide. Tout ce qui est cruel, violent et rapide a déjà été libéré. Mais, au fond de la jarre, il reste une petite chose, à peine visible, calme et sereine : l'espérance. Cette dernière, bien que la seule force bénéfique encore présente, demeure enfermée dans la jarre, comme si elle ne devait pas se répandre, comme si elle ne méritait pas d'être partagée. Elle reste là, à l'état de semence, à l'abri, comme une lueur d'espoir que l'humanité pourrait, peut-être, un jour saisir, mais seulement à travers une grande lutte.
Pandore devient ainsi un mal paradoxal. Bien qu'elle soit une figure humaine, porteuse de désirs et de contradictions, elle incarne un mal étant à la fois une malédiction et une nécessité. L'humanité ne peut pas s'en passer, car elle est intrinsèquement liée à ses désirs et à ses instincts, mais elle devient également un fardeau qu'on ne peut plus supporter sans souffrir. Pandore est donc le reflet de l'ambiguïté de la condition humaine, de ses contradictions profondes entre le bien et le mal, l'amour et la souffrance.
Celui par qui tout le mal arrive
«Et dans son sein, le Messager, tueur d'Argos, crée mensonges, mots trompeurs, cour artificieux, ainsi que le veut Zeus aux lourds grondements. Puis, héraut des dieux, il met en elle la parole et, cette femme, il donne le nom de Pandore parce que ce sont tous les habitants de l'Olympe qui, avec ce présent, font présent du malheur aux hommes.» (Hésiode, Théogonie, 79-82).