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Prajapati

Un dieu de l'Inde

Tout est compris dans Prajapati : il est l'univers, le Temps et l'Autel du sacrifice. Il incarne la force créatrice, une puissance divine agissant sur les différents aspects du monde, tant manifesté que non-manifesté. En tant que divinité suprême, il n'est pas seulement un créateur, mais également un ordonnateur, rétablissant l'ordre dans un cosmos initialement chaotique et informe. Il joue le rôle de médiateur entre l'invisible et le visible, unissant ce qui semblait séparé. Prajapati est le trente-quatrième dieu parmi les trente-trois autres divinités, les rassemblant pour former une unité divine. C'est grâce à son action que ces divinités se rejoignent, ce qui crée l'harmonie cosmique.

Prajapati est donc celui qui donne forme à la réalité et met en place le fonctionnement de l'univers, apportant l'équilibre entre la lumière et l'ombre, le bien et le mal, l'ordre et le chaos.

La création

Au commencement, il n'y a que l'eau. Cette eau, pure et infinie, représente l'élément primordial de l'univers. Les eaux augmentent leur chaleur intérieure, un processus mystérieux et mystique. C'est au coeur de cette chaleur qu'un ouf apparaît. De cet ouf naît Prajapati, le maître des créatures et de la prospérité. Cet oeuf, symbole de potentiel infini, devient le point de départ de la création du monde tel qu'on le connaît.

Il brise cet oeuf, un acte symbolique de division et de séparation des éléments. Dans la coquille de l'oeuf, il flotte pendant une année, seul, réfléchissant à la création à venir. C'est pendant cette année de solitude et de contemplation que Prajapati commence à donner forme à la réalité.

Au cours de cette année, il dit "Bhuh" et la Terre apparaît, une terre fertile et prête à accueillir la vie. Il dit "Bhuvar" et l'air apparaît, remplissant l'espace de souffle et de mouvement. Il dit "Suvar" et le ciel apparaît, une vaste étendue qui relie la terre et l'infini. De ces trois syllabes initiales, il crée les éléments fondamentaux de l'univers. Puis, il ajoute deux autres syllabes qui deviennent les cinq saisons, chacune correspondant à un aspect différent de l'existence. Prajapati se lève finalement, son ouvre de création commencée. À ce moment-là, il est âgé de mille années, portant sur ses épaules le poids du temps. "Comme on regarde au loin la rive opposée d'un fleuve, de même il contemple au loin la rive opposée de son âge" (Catapatha-Brahmana, XI, 1, 6, 6). Il regarde ainsi la fin de son cycle de vie, sachant qu'il doit en même temps créer et détruire, faire et défaire, dans un équilibre constant.

De sa bouche, Prajapati conçoit les dieux, des entités divines qui, aussitôt créées, prennent possession du ciel. De son souffle intérieur, il crée les Asuras, les esprits mauvais, qui, eux aussi, prennent possession de la terre et des ténèbres. La terre est désormais peuplée de forces opposées, le bien et le mal étant également présents. Il donne aussi l'existence aux hommes, ces êtres mortels, aux mélodies, symboles de la beauté de l'univers, et au soleil, source de lumière et de vie. Prajapati crée ainsi le monde par "émanation", un processus mystérieux où tout découle de lui-même. Cette émanation peut signifier aussi bien un processus de sudation, où des particules subtiles s'échappent de l'être divin, ou bien une émission séminale, suggérant un acte créatif originel.

Le sacrifice

Prajapati, dans son processus de création, se consume et ressent l'épuisement. Il crée l'univers, mais cela lui coûte une grande énergie, une perte d'essence divine. «Après que Prajapati eut créé les êtres vivants, ses articulations ont été disloquées.» Il a versé sa propre substance divine dans le monde, et cela lui a causé un épuisement profond, affectant sa forme physique. Or, Prajapati représente l'année dans son cycle complet, et ses articulations symbolisent les jonctions essentielles du temps : le jour et la nuit, la pleine lune et la nouvelle lune, ainsi que les commencements des saisons. Ces articulations sont les points où le monde change, où le temps se renouvelle constamment.

Il était incapable de se relever avec ses articulations relâchées, et les dieux, par pitié et pour restaurer l'ordre cosmique, intervinrent. Ils le guérirent par le rituel de l'agnihotra, une offrande sacrée de feu, en raffermissant ses articulations et en rétablissant ainsi l'ordre divin (Satapathabrahmana, I, 6, 3, 35-36).

Le corps désarticulé de Prajapati, une représentation du monde brisé, est réintégré par le sacrifice. Le sacrifice devient ainsi le mécanisme par lequel le dieu reste vivant, en quelque sorte unifiant le monde, le maintenant fertile et viable. Ce rituel sacré est nécessaire pour faire circuler l'énergie divine dans l'univers. Le sacrifice symbolise également la nécessité de maintenir un lien entre l'homme et le divin, entre la terre et le ciel. «Le soleil ne se lèverait pas si le prêtre, à l'aube, n'offrait l'oblation du feu» (Satapathabrahmana, II, 3, 1-5). Ainsi, chaque acte de sacrifice renouvelle la vitalité de l'univers.

La célébration de ce rite est le pendant exact de l'acte créateur. Ce rituel sert à réunir ce qui a été dispersé lors de la création, il rétablit l'unité primitive du monde et donne à chaque chose sa place et son ordre. Le sacrifice devient un acte continu, essentiel à l'entretien de l'équilibre de l'univers. Il est une sorte de respiration divine, un cycle incessant permettant à Prajapati de «poursuivre son oeuvre créatrice» et de maintenir l'ordre cosmique (Satapathabrahmana, X, 1, 5, 1).

Le sacrifice

Prajapati dit à son fils Indra : "Il faut que je sacrifie pour toi, à l'aide de ce sacrifice qui comble les désirs." Cela montre la compréhension profonde de Prajapati des forces du désir, de la création et de la destruction. "Soit," répondit Indra, acceptant le sacrifice. Ce sacrifice accompli, Indra forma un désir : "Puis-je être le tout!" En accomplissant ce vou, il devint la parole, car la parole elle-même est le tout, l'élément fondamental de la création. La parole est le véhicule par lequel tout est communiqué, elle est l'outil de la manifestation divine. Voilà pourquoi on dit que la parole est Indra, car elle est l'énergie créatrice qui permet à tout d'exister (Catapatha-Brahmana, IX, 18).

Dernière mise à jour : Vendredi, le 7 février 2025