Sin
Dieu sumérien
Coiffée du croissant aux deux pointes relevées, semblable à un esquif fendant les flots célestes, Sin navigue dans l'immensité des cieux, illuminant la nuit de son éclat bienveillant. Depuis la nuit des temps, l'Homme lève les yeux vers lui, fasciné par cette lueur paisible qui veille sur les ténèbres et rythme le passage des jours et des saisons. De génération en génération, des récits mythologiques, des hymnes et des prières ont été consacrés à ce dieu lunaire, garant de l'ordre cosmique et protecteur des voyageurs nocturnes.
Sin est connu sous plusieurs noms selon les civilisations : les Sumériens l'appellent Souen ou Nanna, tandis que les Akkadiens le nomment Nannar. Quel que soit son nom, il est l'incarnation de la sagesse, du renouveau et de la fertilité. Il est généralement représenté sous les traits d'un souverain majestueux, drapé dans une tunique ornée de symboles divins, assis sur un trône sculpté à l'effigie des astres. Une longue barbe drapée sur sa poitrine, semblable à la traînée argentée laissée par la Lune dans le ciel nocturne, atteste de son ancienneté et de son autorité immuable. Dans sa main droite, il tient des insignes de pouvoir : la hache, tranchant l'ombre et la lumière, rendant justice aux hommes et aux dieux; le sceptre, marque de son règne céleste ; et le bâton, signe de guidance et de protection, qu'il tend aux mortels égarés.
Sin occupe une place centrale dans les croyances et les rituels de l'ancienne Mésopotamie. Dans les cités sumériennes d'Ur et de Harran, des temples immenses lui sont dédiés, où prêtres et prêtresses observent attentivement ses phases, cherchant dans ses mouvements la volonté des dieux. La Lune, avec son cycle régulier de croissante et décroissante, est perçue comme un message divin inscrit dans le firmament. Chaque apparition de Sin est interprétée comme un présage : un croissant limpide promet prospérité et bonnes récoltes, tandis qu'une Lune voilée est annonciatrice de troubles et de malheurs.
En tant que divinité lunaire, Sin est également le père de Shamash, le Soleil, éclairant le jour et veille à la justice. Le contraste entre le père et le fils est saisissant : Sin brille d'une lumière douce et protectrice, propice aux songes et à la contemplation ; Shamash, lui, inonde le monde de son éclat brûlant, réveillant la terre, mais aussi imposant son implacable jugement. La lumière de Sin est perçue comme une bénédiction : elle éclaire les sentiers perdus et guide les caravanes à travers les déserts, assurant leur passage en sécurité sous son oil vigilant. En contraste, la lumière du Soleil, bien qu'indispensable, est souvent redoutée : elle brûle les champs, assèche les rivières et consume tout ce qui n'est pas à l'abri de son ardeur.
Le croissant de lune, avec sa forme caractéristique, évoque des cornes dressées vers le ciel. Cette ressemblance a nourri des légendes où Sin est comparé à un taureau céleste, jeune et vigoureux, dont la puissance croît au fil des jours, atteignant son apogée lors de la pleine lune, avant de décliner doucement. Dans les hymnes anciens, on le décrit comme le «Taureau du Ciel», force primordiale qui insuffle la vie et anime le cycle de la nature. Ce mouvement perpétuel de croissance et de décroissance inspire les hommes et rythme leurs existences, servant de repère pour l'agriculture, les festivités et les rites funéraires.
À travers le monde antique, Sin est invoqué pour sa sagesse et sa bienveillance. Les souverains consultent ses prêtres avant d'entreprendre de grandes décisions, cherchant dans la danse des étoiles les signes de leur destinée. Les marchands lui adressent des offrandes pour assurer la prospérité de leurs échanges, et les marins prient pour que sa lumière les guide à bon port. Dans les chants des poètes et les incantations des mystiques, son nom résonne comme une promesse d'espoir dans l'obscurité.
Hommage à Sin
«Fier tourillon, aux cornes épaisses, aux proportions parfaites,
Symbole de puissance et de renouveau, astre de la nuit aux reflets d'argent,
À la barbe de lapis-lazuli, teinte de mystère et de grandeur,
Père de la clarté qui perce les ténèbres,
Seigneur des cycles et des astres, maître des eaux et des ombres,
Celui dont la lumière douce embrasse la terre,
Plein de virilité et de plénitude, éclat sans fin dans la voûte céleste,
Père miséricordieux et indulgent,
Gardien des âmes errantes et protecteur des justes,
Toi qui tiens dans ta main la vie de tout le pays,
Seigneur des songes et des visions prophétiques,
Que ton éclat veille à jamais sur tes fidèles.» (St. Langdon, Oxford Editions of Cuneiform Text, t. IV, page 6).